Un lecteur m’a fait parvenir le résultat d’une étude observationnelle en conclusion de laquelle il semblerait que la consommation d’œufs augmente le risque d’avoir des événements cardiovasculaires ou de mourir de n’importe quelle cause.
Dans cette étude, les chercheurs ont combiné les données de 9 615 patients provenant de six grandes études de cohortes américaines. Les participants ont fourni un historique alimentaire à partir d’un questionnaire sur la fréquence alimentaire au départ. Ils ont ensuite été suivis pour les événements cardiovasculaires et les décès, toutes causes confondues, pendant une période médiane de 17 ans et les conclusion sont que chaque 300 mg supplémentaire de cholestérol alimentaire ou chaque moitié d’œuf consommé par jour était associé de façon significative à un risque accru de MCV accidentelles et de mortalité toutes causes
Ce qui ne manque pas de laisser dubitatif…
- En 2015, les 2015–2020 Dietary Guidelines for Americans1 qui font référence dans le monde de la diététique ont supprimées la mention visant à limiter la consommation de cholestérol alimentaire à 300 mg par jour, celle-ci étant considérée comme obsolète.
- Dans cette étude, chaque 300 mg supplémentaire de cholestérol alimentaire ou chaque moitié d’œuf consommé par jour était associé de façon significative à un risque accru de MCV accidentelles. Un œuf contenant environ 180 mg de cholestérol, il eut été intéressant d’avoir la même étude mais comprenant la consommation de cervelle, celle-ci étant parmi les aliments dont la teneur en cholestérol le plus élevé (3 100 mg pour la cervelle de veau, 2 080 mg pour la cervelle d’agneau). Nous aurions alors eu droit à une explosion de décès ?
- Deux études d’intervention de grande ampleur sur des sujets à haut risque cardiovasculaire (MRFIT, 12 866 hommes de 35 à 57 ans, et PREDIMED, 7 447 hommes et femmes) ne concluent pas non plus à un effet délétère du cholestérol alimentaire.
- Je n’ai pas tout épluché, mais les quelques études que j’ai trouvé sur ce sujet démontrent un accroissement modeste de la mortalité en cas de consommation importante2, ou encore une augmentation de la mortalité avec la consommation d’œufs même en quantité importante3 et même une diminution de celle-ci4.
Il convient donc d’être très prudent avec ce genre d’étude, celle-ci étant basé sur un questionnement alimentaire comportant de nombreuses lacunes. Par exemple, comparativement aux personnes qui ne mangeaient pas d’œufs, celles qui en mangeaient deux ou plus par jour étaient beaucoup plus jeunes, étaient beaucoup plus susceptibles d’être des hommes, d’origine afro-Américaine, actuellement fumeur et mangeaient deux fois plus de calories par jour. D’autre part, nulle part était mentionné la façon dont étaient consommés les œufs (à la coque, frit dans de l’huile de mauvaise qualité, dans de la nourriture industrielle…) et cette étude ne concernait qu’une population américaine, dont la propension à la malbouffe est universellement réputée…
Bref, une étude à prendre avec toute la circonspection possible !
1 health.gov : 2015–2020 Dietary Guidelines for Americans (page 32)
2 Watermark : Egg consumption in relation to cardiovascular disease and mortality : the Physicians’ Health Study
3 Canadian Journal of Diabetes : Impact of Egg Consumption on Cardiovascular Risk Factors in Individuals with Type 2 Diabetes and at Risk for Developing Diabetes : A Systematic Review of Randomized Nutritional Intervention Studies
4 PubMed : Associations of egg consumption with cardiovascular disease in a cohort study of 0.5 millions Chinese adults