Dans les comptes-rendus des études cliniques, l’efficacité d’un produit est quasiment toujours exprimée en pourcentages relatifs et il est notoire que ces derniers présentent de manière beaucoup plus avantageuse les maigres performances de certains médicaments (telles les statines, par exemple…). Pour ceux qui souhaitent plus de détails, j’explique en page Les pourcentages relatifs / absolus dans les essais cliniques combien il est fallacieux et trompeur (mais surtout avantageux…) de présenter des résultats en pourcentages relatifs plutôt qu’en pourcentages absolus.
Par contre, dans ces mêmes études cliniques, les effets secondaires sont toujours présentés en pourcentages absolus. Ceux-ci sont plus proches de la vérité, mais hélas beaucoup moins flatteur qu’une présentation en pourcentages relatifs. C’est ainsi que l’on arrive à prouver que les statines ont 35 % d’efficacité par rapport au placebo avec des effets secondaires ne représentant moins que quelques pourcents…
C’est hélas une facilité dont les labos use et abusent quotidiennement afin de présenter leurs maigres résultats sous le meilleur jour possible et que la plupart des médias reprennent sans aucunes analyse critique.
J’ai donc décidé de présenter l’efficacité des statines et les effets secondaires exactement selon la même méthode, c’est-à-dire en pourcentages relatifs.
Concernant l’efficacité des statines, je me suis appuyé sur une étude clinique souvent citée comme référence et dont les résultats ont été un tel succès que celle-ci a été stoppée bien avant son terme afin que tous les patients puissent bénéficier d’une telle avancée, j’ai nommé l’étude JUPITER dont les nombreux biais, omissions et mensonges ne l’empêche pas d’être encore à l’origine de nombreux articles élogieux1. Celle-ci faisait état d’une réduction de 43 % du critère principal (un critère fourre-tout permettant d’améliorer les résultats et comprenant infarctus du myocarde non mortel, accident vasculaire cérébral non mortel, hospitalisation pour angine instable, procédure de revascularisation artérielle ou décès confirmé de causes cardiovasculaires ;plus le nombre de critères est élevé, plus le résultat à de chance d’être avantageux…), de 24 % des décès de causes cardiovasculaires et de 19 % des décès toutes causes confondues.
Concernant les effets secondaires, j’ai cherché les pourcentages les plus représentatifs résultants majoritairement d’études indépendantes. Les labos ayant la fâcheuse tendance, lors de la publication de leurs études cliniques, à minimiser tout effet secondaire, voire à occulter soigneusement toute référence à ceux-ci2.
Et puisque faisant référence à l’étude JUPITER (un franc succès, d’après les auteurs de l’étude…), j’en profiterai pour rappeler que l’augmentation des cas de diabètes observés lors de cette étude n’ont été révélés par d’autres scientifiques indépendants que… 8 ans après la fin de l’étude3…
Évidemment, je ne doute pas un instant que certains esprits chagrins y trouveront à redire : les études ne sont pas les mêmes, donc les résultats ne peuvent être comparés, les études présentées sont prospectives et non randomisées, blablabla, etc. À ceci, je répondrai que c’est de bonne guerre… Lorsque l’on voit la quantité d’article (sponsorisés par les labos) vanter les qualités de produits commercialisés par ces mêmes labos, avec des pourcentages relatifs qui ne veulent strictement rien signifier de concret (pourcentages que d’ailleurs toute la presse reprend unanimement sans broncher), j’estime qu’il est légitime d’utiliser les mêmes armes que les labos pour les confronter sur leurs propres terrains.
Alors, allons-y :
Pourcentages relatifs : efficacité statines vs effets secondaires
Concernant l’efficacité des statines (selon l’étude JUPITER), nous avons :
Efficacité sur le critère principal (critère composite fourre-tout qui permet d’améliorer les résultats…) : | 43 % |
Efficacité sur les réductions des décès de causes cardiovasculaires | 24 % |
Efficacité sur les réductions des décès toutes causes | 19 % |
Concernant les effets secondaires, nous avons une augmentation de ceux-ci dus aux statines de :
(a) Valeurs initialement exprimées en OR (ODD-RATIO). Fautes de données permettant d’extraire le RRR (Réduction de Risque Relatif), celui-ci a été converti à la louche en pourcentages de cas supplémentaires par rapport à la normale afin de fournir un ordre d’idée. Si quelqu’un possède néanmoins la valeur exacte, je suis preneur !
Conclusion sur l’ensemble des résultats présentés en pourcentages relatifs :
Si les résultats concernant l’efficacité des statines et l’augmentation des effets secondaires sont présentés de la même manière, c’est-à-dire en pourcentages relatifs, les résultats ne sont absolument pas à l’avantage des statines. On peut même en conclure que les statines provoquent une augmentation spectaculaire des effets secondaires, largement plus conséquente que leur efficacité, rendant celles-ci extrêmement dangereuses pour la santé…
Ce qui prouve bien que les labos pharmaceutiques, en présentant différemment les résultats des études et les effets secondaires, manipulent l’opinion afin de faire passer pour miraculeux des produits qui sont loin de l’être !
1 À l’image de cette méta-analyse publiée par The Lancet : Efficacy and safety of statin therapy in older people: a meta-analysis of individual participant data from 28 randomised controlled trials
2 PLOS Medecine : Reporting of Adverse Events in Published and Unpublished Studies of Health Care Interventions: A Systematic Review
3 Thierry Souccar Editions : Un effet indésirable des statines : le diabète
4 Vu le peu d’efficacité à la base du vaccin, il ne doit plus rester grand chose… Plus d’information sur La grippe et le vaccin antigrippal (ou l’art de manipuler l’opinion afin de vendre un vaccin totalement inutile…)
Merci pour cet article très intéressant, qui m’amène à la question suivante :
Un de mes amis est mort récemment d’une SLA, il prenait des statines depuis plus de 20 ans.
Dois-je en déduire que la probabilité que sa SLA ait été provoquée par les statines est de plus de 90% (RR= 900 à 10600%) ?
La réponse n’est pas aussi simple car dépendant de plusieurs éléments.
Tout d’abord, il s’agit d’une étude observationnelle et comme toute étude de ce type, corrélation ne vaut pas forcément causalité, bien que dans ce cas et au vu des résultats, on peut fortement le suspecter. En effet, la plupart des statisticiens sont d’accord qu’un odds ratio (ROR) > 6 représente une preuve de causalité, rapport qui, dans le cas de cette étude est allègrement dépassé. Ce qui accrédite la thèse selon laquelle les statines provoquent une augmentation sérieuse des cas de SLA.
D’autre part, les cas de SLA sont extrêmement rares (un médecin à de grandes chances [ou risque, c’est selon…] de ne pas en voir un seul cas au cours de sa carrière…) et cette étude porte donc sur un nombre de cas relativement restreints.
Ensuite l’augmentation des cas varie selon les statines, les risques étant, par ordre décroissant :
Statine (ROR)
Lovastatin : 107
Simvastatin : 23,1
Pitavastatin (non commercialisée en France) : 19,3
Atorvastatin : 17
Pravastatin : 16,2
Fluvastatin : 13,7
Rosuvastatin : 9,1
Pour terminer, le risque de SLA n’est répertorié dans aucune notice accompagnant les statines, cela signifie donc que ce risque n’est pas reconnu pas les autorités médicales et sera donc rejeté en cas de déclaration de pharmacovigilance. On peut se rappeler qu’il a fallu quasiment 40 ans pour que soient reconnu l’augmentation des cas de diabètes dus aux statines (et encore du bout des lèvres) et dont le nombre est autrement plus conséquents que les cas de SLA, et lorsque l’on voit comment sont niés ou minimisés la plupart des effets secondaires indésirables telles que fatigue, douleurs musculaires (c’est dans la tête des patients…), à moins d’une class action de grande ampleur aux USA, je ne suis pas très optimiste sur une reconnaissance de l’augmentation de cette pathologie comme étant due aux statines.
Mais j’espère me tromper…