L’affaire Sanofi/Doliprane n’est qu’une vaste opération d’enfumage

Sanofi veut de séparer de sa filiale Opella qui produit du Doliprane ainsi qu’une vingtaine d’autres produits en la vendant au fond de pension américain CD & R. Les actionnaires de référence de Sanofi sont L’Oréal, détenu par la famille Bettencourt, mais aussi les fonds d’investissement Dodge & Cox et Amundi1(encore et toujours les fameux fonds de pension…).

On peut remarquer que cette cession est orchestrée d’une main de maître par Frédéric Oudéa, qui fut membre du cabinet de Nicolas Sarkozy à Bercy, puis nommé directeur général de la Société générale et président de la Fédération des banques françaises, afin d’organiser le lobbying face aux velléités publiques de réguler la finance après la crise de 2008. Question enfumage, encore un premier de la classe !
Pour l’anecdote, il est aussi le mari de celle qui fut très (très…) brièvement ministre à l’Éducation nationale, avant de se faire rapidement virer du fait de son incompétence notoire…
On a le beau linge que l’on mérite !

Notre gouvernement fait de cette affaire une question de souveraineté nationale.

Soit !

Déjà, il faut savoir que l’usine de Sanofi ne fait que le conditionnement du Doliprane®, le principe actif de celui-ci étant le paracétamol, dont la source d’approvisionnement est l’Asie2.

Question souveraineté nationale, on repassera…

Certes, deux usines devraient être capables de fabriquer du Paracétamol début 2025. La première est la start-up Ipsophène qui devrait produire à terme 4 000 tonnes de paracétamol3 ; l’autre, appartenant au groupe Seqens, se situera en Isère. Celle-ci est subventionnée à hauteur de 30 à 40 % par l’état et devrait produire 15 000 tonnes de paracétamol par an, soit 50 % du marché européen4. Il faut savoir que le groupe Sequens appartient à un fonds d’investissement américain depuis la crise sanitaire (SK Capital Partners).

Vous voyez où je veux en venir ? Une fois bien exploité le filon des aides, quelle garantie que cette usine ne sera pas revendue ou délocalisée ? Il faut savoir que l’unique but des fonds de pension est une rentabilité maximum (si possible à 2 chiffres…), sans aucune considération d’éthique ou de respect des travailleurs.

Notre souveraineté nationale, si vanté par le gouvernement, est loin d’être un long fleuve tranquille…

Pour en revenir au Doliprane, celui-ci est composé principalement de paracétamol, qui se trouve être dans le domaine public. Une simple recherche sur le Vidal nous donne environ une trentaine de labos qui conditionnent ce produit5. Donc même si Opella se barre à l’étranger, ce sera loin d’être la catastrophe que notre gouvernement voudrait nous faire avaler. Au lieu d’acheter du Doliprane®, eh bien l’on demandera du Paracétamol machin, ou truc. Ainsi ce seront les petits labos qui en profiteront, ainsi que les emplois qui vont avec (puisque c’est une des préoccupations du gouvernement) !

Bref, le gouvernement est monté sur ses grands chevaux, on allait voir ce qu’on allait voir.

Notre ex-ministre de l’Économie s’est engagé à ce que le Doliprane® continue d’être fabriqué en France (on se souvient encore du peu de fiabilité des prédictions de l’abruti en col roulé…) et l’état va entrer au capital de Sanofi à hauteur de participation symbolique (2 % du capital).
L’état n’étant pas majoritaire, ceci n’empêchera nullement CD & R de revendre l’entreprise à moyen terme pour réaliser une plus-value, comme le font tous les fonds de pensions, dont l’horizon est compris entre cinq et dix ans.
Donc peu importe les gesticulations du gouvernement, le sort des employés de cette entreprise est déjà tout tracé. Cette fois aussi, une fois bien exploité les filons des aides afin de « soi-disant » sauvegarder les emplois, l’entreprise sera liquidée ou délocalisée. Il y a eu de nombreux précédents et la France possède un lourd passé dans ce domaine6.

Une petite dernière, pour la route : l’état a demandé un audit des aides perçues par Sanofi depuis 10 ans7. Ce qui signifie que l’état donne des milliards d’Euros aux entreprises, sans que l’on soit en mesure de savoir qui en profite et ce qu’il en est fait. Nous pouvons affirmer que question gabegie financière, nous avons un gouvernement de champions !

Pour ce cas précis, il semblerait que Sanofi ait bénéficié d’un milliard de crédits d’impôts en 10 ans8, ce qui ne l’a nullement empêché d’annoncer plusieurs restructurations qui provoqueraient, au total, la suppression ou l’externalisation de 3 000 emplois sur 17 000 en France. Pas mal pour un groupe qui a réalisé 43 milliards d’euros de chiffres d’affaires en 2023 et reversés 4,4 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires9.

Preuve, une fois de plus, que ce sont les multinationales qui dirigent le monde, et non pas les gouvernements…

 

3 réflexions au sujet de “L’affaire Sanofi/Doliprane n’est qu’une vaste opération d’enfumage”

  1. Merci pour cet article, on comprend mieux et surtout cette analyse permet de mettre en lumière qu’il n’y a absolument aucun contrôle des fonds publics investis. Open bar pour résumer ! pourquoi se gêner, qui paie, toujours les mêmes et notre pays régresse au lieu de prospérer et tout le monde s’en fout.

    Répondre
    • Il faut savoir que la quasi-totalité des médias français (presse écrite, radio et chaines audiovisuelles) est aux mains de 7 familles qui touchent toutes d’importantes subventions de la part de l’état. Le tigre ne mort pas la main qui le nourri…

      Répondre

Laisser un commentaire