L’académie de médecine vient d’approuver un document intitulé «Efficacité et effets indésirables des statines : évidences et polémiques
» dont l’objectif est, je cite, «de revoir les évidences scientifiques en faveur du bénéfice des statines dans la prévention des maladies cardio-vasculaires ou de leur récidive, les effets indésirables rapportés, les conséquences qu’ont eu les interruptions intempestives de traitement et d’analyser les raisons qui ont conduit à l’émergence de polémiques concernant leur utilisation
».
Disons-le tout net : ce document n’a strictement rien d’objectif et n’est qu’un panégyrique de plus à la gloire des statines…
Commençons déjà par les liens d’intérêts des auteurs ayant commis cette étude : sur les 9 auteurs, 1 seul déclare n’avoir strictement aucun conflit d’intérêts avec les industries pharmaceutiques et bénéficier seulement d’une subvention de l’ANSM pour des recherches publiques, tous les autres déclarent recevoir des financements de la part des labos. Parmi ces derniers, la plupart se défaussent de toute responsabilité par le fait que leurs financements ne concernaient pas les statines (on peut donc en conclure qu’ils ne savent pas de quoi ils parlent…).
Il serait judicieux que ces professeurs cessent de nous prendre pour des imbéciles !
Imaginons un commercial travaillant pour un grand constructeur aéronautique et rémunéré par ce dernier pour vendre de luxueux jets privés fabriqués par ce même constructeur à de richissimes hommes d’affaires. Imaginons que ce brillant commercial se mette à critiquer ouvertement (et vertement) son entreprise auprès des clients, des médias ou dans la presse, car il considère totalement immoral que celle-ci commercialise des avions de guerre à un pays étranger, tout en sachant que ce dernier s’en sert pour bombarder les civils du pays voisins1. Question subsidiaire : à votre avis, combien de temps ce commercial va-t-il rester salarié de cette entreprise ?
Nous avons là exactement la même problématique : combien de temps ces grands professeurs vont rester salariés de ces entreprises pharmaceutiques s’ils se mettent à critiquer et à dénigrer les statines produites justement par ces mêmes industries pharmaceutiques ?
Je le redis donc : Il serait judicieux que ces professeurs cessent de nous prendre pour des imbéciles !
Pour en revenir aux statines, je résume le document : elles sont parées de toutes les vertus, efficaces, pas cher, sauvent beaucoup de vies et sont strictement sans danger.
Quant aux effets secondaires, seuls 3 sont détaillés (et encore…) dans ce document : le risque musculaire et hépatique, le risque de diabète et le risque cognitif (les autres ne valant même pas la peine d’être évoqués…).
- Risque musculaire et hépatique : déjà le mélange des deux effets secondaires permet de noyer le poisson… Les auteurs admettent que 10 à 25 % des patients ressentent des douleurs musculaires, mais une étude ayant définie que 10 % des patients sous statines avaient des douleurs vs 5 % des patients sous placebo, seul 5 % des douleurs musculaires sont véritablement imputables aux statines. Les autres cas étant soit des douillets, soit des affabulateurs… Quant aux risques hépatiques, rhabdomyolyse et autres myosite nécrosante. Pffff… les cas sont extrêment rares et proviennent de toute façon des patients : «
Différents facteurs favorisants ont été identifiés : masse musculaire réduite (vieillissement, sexe féminin, handicap physique) ou toxicité musculaire de substances prises simultanément (colchicine, alcool)
». - Risque cognitif : quels risques cognitifs ? Les statines sont absolument sans danger, ce sont les labos qui nous le disent…
- Risque de diabète : Là, j’ai gardé le meilleur pour la fin… Le document fait état de 1 cas de diabète pour 500 personnes sous faibles doses de statines et jusqu’à 1 cas de diabète pour 155 personnes sous statines à forte dose. Connaissant l’efficacité en pourcentage absolue des statines, on peut en conclure que vous avez plus de risques de devenir diabétique que de chances d’éviter un évènement cardiovasculaire grâce aux statines ! Et comme le diabète est un facteur aggravant des maladies cardiovasculaires, les labos seront trop heureux de vous augmenter la dose de statines, ce qui aggravera votre diabète,voire même de vous prescrire des produits soi-disant plus efficaces (PCSK9) mais qui ont surtout fait preuve de leur efficacité uniquement à augmenter le chiffre d’affaires des dits labos…
Et encore, ces chiffres ont été établis à partir d’étude financées par les laboratoires pharmaceutiques, et donc largement favorables aux statines et tout en minimisant fortement leurs effets secondaires2.
La conclusion est elle aussi du même acabit : « L’arrêt des statines conduit une augmentation de 45 % de la mortalité et de 15 % des événements vasculaires chez les patients prenant moins de 80 % de leur traitement en comparaison de ceux qui sont adhérents.».
Ahhh, la fabuleuse magie des pourcentages relatifs… (pour ceux qui ne connaissent pas la différence entre % absolus et relatifs, je les invite à jeter un œil ici).
Par curiosité, je suis allé voir l’étude cité3 et voici qu’elles en sont les conclusions : «Les différences de risque absolu estimées pour toute MCV associée à une mauvaise observance des médicaments étaient de 13 cas pour tout médicament vasculaire, 9 cas pour les statines et 13 cas pour les antihypertenseurs, par 100 000 personnes par année.
»
Autrement dit et à moins que je sois nul en mathématiques, un simple calcul prouve que l’on traite annuellement 100 000 personnes aux statines pour éviter 9 cas de MCV, c’est-à-dire une efficacité annuelle reconnue des statines en pourcentages absolus de 0,009 % (J’en profite pour rappeler les 1 cas de diabète pour 155 personnes traitées intensivement aux statines !).
Aussi lorsque je vois la conclusion finale qui assène que le rapport risque bénéfice est laaaaaaaargement en faveur des statines «et sans commune mesure par rapport aux effets secondaires rapportés
», je me dis que l’on continue encore et toujours à nous prendre pour des imbéciles…
- Académie de médecine : Efficacité et effets indésirables des statines : évidences et polémiques
1 Maladies cardiovasculaires, cholestérol et statines : La fondation Bill & Melinda Gates, le summum de l’hypocrisie (4) ?
2 Maladies cardiovasculaires, cholestérol et statines : Les sources de financement impactent les résultats des essais cliniques