J’ai depuis toujours une profonde méfiance pour ces milliardaires qui prétendent, grâce à leur fortune, vouloir sauver le monde. Ces derniers me paraissant plutôt vouloir imposer à coup de milliards de dollars une vision du monde qui n’appartient qu’à eux.
Et donc autant dire que Bill Gates et sa fondation (Bill & Melinda Gates Foundation), malgré une communication dithyrambique reprise en boucle par la plupart des médias, me laissaient totalement indifférent jusqu’à une affaire qui fit peu de bruit à l’époque (2005) mais pour laquelle j’avais néanmoins écrit un bref article1. Celui-ci concernait certaines pratiques douteuses du laboratoire Gilead avec les essais de son antiviral Viread sur des prostitués camerounaises. Essais financés par la fondation Bill & Melinda Gates…
Étant à l’époque en plein démarrage de mon site, je n’avais pas cherché à approfondir l’affaire. Ce début d’année un peu plus calme m’a décidé à me pencher sur les affaires de la famille Gates, et ce que j’ai pu découvrir est vraiment peu reluisant…
Et Bill Gates créa sa fondation
En 2000, Microsoft fait face à des accusations pour abus de sa position dominante2. Bill Gates, afin de redorer un blason quelque peu terni, décide alors de se lancer dans l’humanitaire. De mon point de vue, un personnage que je considérerai comme véritablement bienfaiteur de l’humanité serait quelqu’un qui ferait don anonymement d’une partie de sa fortune à une organisation existante et déjà bien implantée (telles que Médecins sans frontières, Médecins du monde, la Croix rouge, Handicap International, Solidarités International, etc.), ceci sans publicité, sans tape-à-l’œil et sans tapage médiatique. Mais c’était sans compter sans l’égomanie de Bill Gates qui, ne pouvant se satisfaire de disparaître ainsi de devant la scène et œuvrer dans l’hombre pour le bien de l’humanité, a décidé de créer sa propre fondation à son nom afin que le monde entier ne puisse jamais oublier le sien…
Les donations aux « Foundations » ou comment s’enrichir en payant peu d’impôts
Concernant les «Foundations », il faut savoir qu’aux États-Unis, le principe des fondations caritatives est totalement différent de celui des associations régies par le droit français.
Un donateur doit verser au moins 5 % de son capital3 dans une fondation pour bénéficier d’avantages fiscaux conséquents4. Dans le cas présent, ce ne sont uniquement qu’une partie des intérêts et des dividendes de la fortune de Bill Gates qui sont reversés dans la fondation, le capital étant confié à un fonds d’investissement qui les fait travailler dans des centaines de sociétés, permettant ainsi de générer d’autres centaines de millions de dollars. De cette manière, non seulement le capital reste intact, mais en plus, il fructifie, ce qui est loin d’être une mauvaise affaire puisqu’en 10 ans, la fortune personnelle de Bill Gates est passée de 56 milliards de dollars pour atteindre plus de 90 milliards de dollars fin 20175. Pour avoir une petite idée de ce que peut représenter une telle somme, c’est 0,5 % du PIB des États-Unis, 3,7 % du PIB français, autant que celui de l’Ukraine, deux fois le PIB de la Tunisie et dix fois le PIB de la République du Congo !
Les investissements concernant la fortune personnelle de Bill Gates sont pour la plupart géré par la société d’investissement « Cascade Investment LLC »6. Celle-ci, administrée depuis le début par Michael Larson, a été créé par… Bill Gates et est rattaché à… la fondation Bill et Melinda Gates7 (c’est quand même mieux quand ça reste en famille !) dont il gère également les actifs.
Gestion plutôt réussie puisque ce fonds d’investissement peut s’enorgueillir d’un rendement annuel de 11 % depuis 19958 !
Les « Foundations », fondations caritatives ou sociétés capitalistes ?
Une autre particularité des « Foundations » est qu’elles peuvent en toute légalité faire fructifier leur capital par des placements tels qu’investissements immobiliers, bijoux, actionnariat, hedge funds et autres placements tout aussi risqués.
En effet, à condition de consacrer au minimum 5 % de leurs ressources à des œuvres caritatives, elles bénéficient en contrepartie d’une taxation de seulement 2 % de leur capital9. Ce dont ne se prive aucunement la fondation Bill & Melinda Gates grâce à cette fameuse société d’investissement « Cascade Investment LLC ». La fondation n’investit dans ses œuvres caritatives qu’une partie des intérêts, permettant ainsi au capital de celle-ci d’atteindre la somme de plus de 40 milliards de dollars10 fin 2016… Et lui permet par même occasion, avec un budget de 5 milliards de dollars en 201511, de dépasser allégrement celui de l’OMS (seulement 4 milliards…)12. Organisation dont elle est également un des principaux financeurs avec… les industries pharmaceutiques…
Cette mainmise de Bill Gates sur l’OMS n’est pas sans danger : la fondation Bill & Melinda Gates en étant le deuxième plus gros financeur après les USA et devant la Grande-Bretagne, impose fortement ses conditions et ses choix dans la gestion de cette dernière13, compromettant de plus en plus l’indépendance de celle-ci. Indépendance toute relative, d’ailleurs, l’OMS étant déjà largement corrompue et soumise aux conflits d’intérêts et sous très forte influence des laboratoires pharmaceutiques14…
Suivant : La fondation Bill & Melinda Gates, le summum de l’hypocrisie (2) ?
1 Maladies cardiovasculaires, cholestérol et statines : La guerre des labos contre notre santé (2005)
2 Alternatives économiques : Monopole : Microsoft coupable
3 City National Bank : FREQUENTLY ASKED QUESTIONS ABOUT PRIVATE FOUNDATIONS
4 Fondation Sources : Benefits of a Private Foundation
5 Forbes : Forbes / Profile / Bill Gates
6 La tribune : Fortune : que fait Bill Gates de tout son argent?
7 Wikipédia : Cascade Investment
8 Financial Times : Cascade Investment, Bill Gates’ wealth manager
9 City National Bank : FREQUENTLY ASKED QUESTIONS ABOUT PRIVATE FOUNDATIONS
10 Bill & Melinda Gates – Financial : Consolidated Financial Statement December 31, 2016 and 2015
11 Le Figaro : Bill Gates : « Notre budget de 5 milliards de dollars est modeste face aux besoins sanitaires »
12 Les échos : ONU : l’OMS, une image écornée (5/7)
13 RTS Info : Bill Gates, donateur généreux et parfois dérangeant
14 Le Point : L’OMS dans les griffes des lobbyistes ?
Les commentaires sont fermés.