Éviter de prescrire inutilement des statines avec PREVENT ?

Merci à Brigitte qui m’a fait parvenir cette info 🙂

Un nouveau calculateur de risque cardiovasculaire nommé PREVENT (Predicting Risk of cardiovascular disease EVENTs) a été mis en ligne sur le site de l’American Heart Association1. D’après l’article, l’utilisation de celui-ci pour estimer le risque cardiovasculaire absolu à dix ans pourrait diminuer radicalement le nombre d’adultes exposés aux statines en comparaison du précédent modèle PCEs. En effet, selon les premières simulations aux USA, il réduirait de plus de moitié les prescriptions de statines2.

Je me demande quel accueil va lui être réservé par les labos ainsi que leurs stipendiaires…

Plus sérieusement, j’ai étudié en détail le fonctionnement de ce calculateur. Déjà, premier « bug », celui-ci est censé calculer le risque cardiovasculaire chez (c’est bien précisé sur leur site) les patients en prévention primaire (ceux sans maladie cardiovasculaire athéroscléreuse ni insuffisance cardiaque) uniquement. Donc sont exclus tous les patients ayant déjà fait l’objet de problèmes cardiovasculaires et auxquels les prescriptions de statines vont perdurer. Ensuite, vu l’efficacité quasi nulle des statines à réduire les maladies cardiovasculaires en prévention primaire, on pourrait carrément en stopper les prescriptions…

On peut noter que le spectre des questions a été élargi, mais que dire de certains éléments ? Bien sûr, on y retrouve le sempiternel taux de cholestérol (total et HDL), quelques questions pertinentes (quoique la pression systolique, vu que maintenant à partir de 12, on est considéré comme pré-hypertendu…), mais aussi quelques aberrations : l’IMC, par exemple, qui ne veut strictement rien dire. En effet, une personne très sportive, et donc très musclé, pourra posséder un indice IMC identique à une personne de même taille et de poids identique, mais dont la masse graisseuse est prédominante.
En outre, à part le fait de fumer ou non, aucune question sur l’hygiène de vie (sport, alimentation, etc.).
Bien que de n’apportant aucune révolution, on doit lui reconnaître d’être un poil plus évolué que l’indigent SCORE23 prôné par l’UE !

J’ai testé le questionnaire en faisant abstraction de mes antécédents cardiovasculaires et je me retrouve avec un score de 11,5 % (Intermediate risk : 7.5 % to 19.9 %), ce alors que j’ai une hygiène de vie plutôt exemplaire (non-fumeur, régime méditerranéen, beaucoup de sport, yoga…). Je me pose donc la question de savoir si, au vu du score, je suis éligible aux statines…

Je me suis aussi permis de tester en modifiant divers paramètres. Par exemple, si je prends déjà des statines, mon score descend à 10,1 % de risque CVD sur 10 ans, soit une réduction annuelle du risque de… 0,14 % par rapport à la non-prise de celles-ci. Question efficacité, on repassera !
Autre bizarrerie, avec une tension systolique de 140 et sans hypotenseur, j’ai un risque de 13,5 %, alors que si je prends des hypotenseurs et que ma tension systolique est de 110, j’obtiens un score de… 14,2 %. Va comprendre l’intérêt de faire baisser sa tension !

Donc quelques doutes, tout de même, sur le bien-fondé de la chose.

Après si ça peut faire baisser les prescriptions de statines, pourquoi pas.

Encore faut-il qu’il ne soit pas torpillé par les labos, qu’il arrive en France et qu’il soit accepté par tous les prescripteurs inconditionnels de statines.

Et ça, ce n’est pas gagné !

 

 

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