Je me délecte toujours de la lecture des chroniques de René Barjavel. Dans celle du 16 mars 1975 il évoque de nouveau le Dr Carton. Voici ce qu’il en dit :
Je l’ai connu en 1938. Père de deux enfants minutieusement soignés par leur mère attentive, désinfectés selon les règles les plus strictes de la pédiatrie moderne, je m’effarais et m’affolais de les voir sans cesse en proie à des otites, des angines et des rhino-pharyngites. Un ami me conseilla d’aller voir le Dr Carton.
Avant de nous donner rendez-vous, il me demanda un relevé minutieux de tout ce que nous faisons boire et manger à nos enfants, pendant une semaine. Quand nous arrivâmes chez lui, il avait cet inventaire sous les yeux ; il était furieux, il nous traita presque de criminel. Il nous expliqua très clairement la cause des maladies multiples dont souffraient notre fils et notre fille : c’est qu’on ne peut pas, sans provoquer de graves dégâts, introduire dans de jeunes organismes, sous prétexte de bien les nourrir, des aliments faits pour des terrassiers ou des chevaux de course. C’était évident. Je n’y avais pas pensé. Personne n’y pense encore aujourd’hui. On bourre les nourrissons comme des super-machines, et tous les appartements des jeunes ménages résonnent des cris des enfants torturés par les otites…
On peut leur épargner cela. Quand je quittais le Dr Carton, il me dit : « Vous n’aurez plus besoin de moi ». C’était vrai. Mes enfants ne furent plus jamais malades.
J’y ajouterai aussi l’extrait suivant :
L’homme normal se porte bien. L’homme qui accueille la maladie est déjà un malade. La vraie médecine devrait donc, avant tout, chercher ce qui a ouvert des brèches dans les défenses naturelles, et, tout en repoussant l’ennemi, reconstituer le rempart, et l’autonomie et l’efficacité des défenses. La véritable médecine n’est pas tellement celle qui guérit le malade, mais celle qui aide l’homme à rester bien portant.
Il me semble que l’on appelle cela le bon sens !
- René Barjavel – Les Années de l’homme (16 mars 1975)